Accueil > Editoriaux > Au-delà de l’horreur

Au-delà de l’horreur

Emotion et recueillement aux obsèques de Sami Ait Abdelmalek

    Partager : sur Facebook, sur Twitter, sur Google+.

Nous étions plus de 2000 à l’Asphodèle (dans la salle, dans le hall, et sur le parvis) pour accompagner Sami Ait Abdelmalek vers sa dernière demeure. Témoignages de sa famille, de ses amis et autres prises de parole ont dit la sympathie qui entourait le jeune homme tué dans une agression collective samedi soir.

A la demande de la famille, des amis de longue date, j’ai dit quelques mots pour exprimer mon soutien. Voici le texte de ma brève allocution.

Il y a un peu plus de trois ans, vous m’aviez demandé mon témoignage pour Youcef, votre père et grand-père : c’était si facile, si normal ; je devais parler d’un ami, malgré les 15 années qui nous séparaient, d’un questembertois qui avait fait sa part dans la vie de la cité et élevé une belle famille, dont Sami que nous accompagnons aujourd’hui était un digne représentant. Et malgré votre deuil, vous saviez vous aussi que la mort de Youcef, c’était dans l’ordre des choses : nos parents nous précèdent dans la vie et dans la mort.

Il y a trois semaines, nous étions autour de vous pour partager l’hommage à Braham, trop tôt parti, à 63 ans.

Vous m’avez sollicité pour aujourd’hui et vous me demandez une tâche impossible, comme il est impossible pour vous de vivre la souffrance indicible de cette mort absurde.

Alors j’ai d’abord pensé à Sami, que j’ai bien sûr croisé ici ou là, mais sans vraiment le connaître. Je ne sais de lui que sa belle réputation. Et il m’est revenu le poème de Rimbaud, le Dormeur du val : le soldat mort dans la belle lumière de l’automne 1870, victime innocente d’une guerre qu’il n’avait pas voulue, qu’il n’avait pas comprise. Fauché dans sa belle jeunesse.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille.

En effet, tranquille, Sami repose en paix, il nous laisse la douleur.

Il vous laisse dans la douleur, vous Mohand, Linda, ses parents. Et nous savons tous ici, certains pour l’avoir vécu, la plupart pour l’avoir observé, que la mort de l’enfant est l’épreuve la plus terrible, la plus abominable, la plus cruelle pour les parents. L’absent reste présent pour toujours. Cette blessure de l’enfant perdu est indélébile, elle ne cicatrise jamais.

Et pourtant, je compte sur vos deux autres enfants, Safia et Karim, sur le reste de votre famille, fortement soudée, sur vos amis nombreux, pour vous aider à traverser l’épreuve et à continuer à vivre malgré tout.

Nous chercherons longtemps, sans trouver de réponse sans doute, par quel enchaînement de bêtise on en est arrivé à ce drame abominable. La justice, quant à elle, apportera une réponse pénale. Mais nous resterons tous avec vous dans la douleur irréparable.

La beauté peut apaiser la douleur

Écoutez cette musique de Gorecki (les paroles sont tirées d’un message gravé par une fillette de 8 ans sur les murs d’une prison nazie).

Symphonie n°3 Sorrowful songs

Publié le jeudi 25 octobre 2018, par Paul Paboeuf.

Messages

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Lien hypertexte

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)

Ajouter un document