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La fin des Festives Halles, une erreur majeure

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Ainsi donc, ce que je voyais venir est arrivé : la municipalité a décidé de faire une croix sur les Festives Halles. Sans concertation, mais on sait bien que ce mot recouvre. Essayons de comprendre et de mesurer les conséquences de cette décision.

Le droit d’aimer ou de ne pas aimer

D’abord, il faut reconnaître à chacun le droit d’aimer la musique baroque ou le heavy metal, la peinture sur porcelaine ou les graffes sur les transfos d’ERDF/Enedis. Pour ma part, j’aime autant les Leçons des Ténèbres de Couperin que les chansonnettes du moment, les orgues des cathédrales que le son canaille de l’accordéon, le théâtre sévère de Racine que les bouffonneries des Deux Anes. Et vous avez le droit de préférer Bigard à Sophie Aram, Radio Classique à Rire et Chansons.

Et puis les Arts de la Rue sont souvent marqués du sceau de l’irrespect et de la provocation comme le carnaval du Moyen-Age. Par exemple, certains se rappellent peut-être le spectacle A vendre donné à Questembert en 2012 par la compagnie Thé à la Rue.


"A vendre" par la Cie du Thé à la RUE - Mas d... par zioun

Aussi provocante, la contre-visite guidée de Questembert par
Jérôme Poulain en 2010
http://www.questembert-creative-sol...

Ça peut déplaire !

Revendiquons ensemble le droit à la différence, et donc admettons que la municipalité définisse ses orientations en fonction de ses préférences artistiques. Si donc on préfère les « animations » proposées par un futur comité des fêtes, pourquoi pas ?

De mauvaises raisons : de faux prétextes

Cependant, il ne faut pas se justifier par de mauvaises raisons qui ne sont que de faux prétextes. Inutile de resservir la baisse des dotations de l’Etat, ça va pourtant venir, mais cet argument a déjà été clairement démonté ici et là.

Mais dire que « la fréquentation était en baisse depuis plusieurs années » est tout simplement faux. Tout comme d’affirmer que « l’ambiance festive des débuts de cette animation, le concours d’effouche-pichons qui attirait tant de participants se sont peu à peu délités avec le temps.  » Quant à dire que les Festives Halles attiraient peu de Questembertois, c’est seulement une bêtise : si les Questembertois représentaient 20 à 25 % du public, ça fait déjà du monde ! Mais ce n’est que de la statistique au doigt mouillé. Et je peux m’interroger sur la « réaction positive des bénévoles » à cette annonce... Mais là je manque de statistiques.

Laissons le mot de la fin l’adjoint en charge de la culture – qui disait au micro de Radio Bro gwened l’an dernier « ce festival est un bijou » ; il dit aujourd’hui : « nous sommes devant une page blanche. » Allons chantons avec lui : « Du passé, faisons table rase ! »

Une erreur de fond

Table rase ! Tâchons de mesurer la perte provoquée par la suppression de ce festival d’arts de rue. D’abord, ça donnait du plaisir à beaucoup de gens, car c’était une fête populaire, familiale, et intergénérationnelle, comme on dit maintenant. La date aussi était bien inscrite dans le calendrier, sans qu’il y ait de concurrence proche : il faut souvent du temps pour installer un événement. D’autre part, le rayonnement de cette fête dépassait largement notre petit territoire et contribuait fortement à l’attractivité de notre ville. Et puis, qui dira la richesse des expériences vécues par les bénévoles, en particulier, ceux qui ont accueilli des artistes chez eux et compris ainsi que les artistes sont de vrais professionnels, sérieux, méthodiques, et non pas des farfelus tout juste capable de … galipettes.

D’ailleurs du côté des artistes, les Festives Halles étaient aussi un grand moment. D’autant que nous nous étions engagés avec d’autres communes dans le réseau régional des arts de rue (RADAR) autour du Fourneau de Brest. Les compagnies accueillies en résidence peuvent en témoigner. Le RADAR était d’ailleurs en réunion à Questembert à la mi-octobre... Et on parlait de la programmation 2017. A voir ici.

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Le RADAR à Questembert le 13 octobre (photo Le Fourneau)

Et quand même rappeler l’histoire

J’ai parfois l’impression que, pour certains, l’histoire de Questembert ne commence qu’en mars 2014. Alors, je crois qu’il faut rappeler l’histoire des Festives Halles. Et j’ai souri de lire que « l’esprit des arts de la rue s’était un peu délité » sous la plume de quelqu’un qui ainsi avouait ne pas trop savoir ni ce que sont les arts de la rue, ni ce qui s’était passé depuis près de 20 ans à Questembert...

Quand j’ai lancé les Festives Halles, sur la suggestion de Roland Becker, qui à l’époque résidait chez nous, il s’agissait de s’appuyer sur la rénovation des Halles pour créer une fête populaire qui serait emblématique de notre ville. Pas question de faire la nième fête bretonne, fête des métiers, fête médiévale... : comment sortir du lot, être reconnu par une proposition originale ? De là le choix des arts de la rue, un thème qui faisait écho à nos halles, lieu de commerce, d’échanges, de rencontre aussi entre la (petite) ville et son environnement rural et agricole. D’où aussi l’idée des effouche-pichons, les épouvantails, nommés de leur nom campagnard, amenés des jardins et des champs jusqu’aux piliers des halles.

La réflexion a conduit aussi à choisir une date en fin d’été, pour ne pas viser seulement les touristes, et permettre aux Questembertois d’y participer après les vacances et avant la rentrée.

Le choix des arts de la rue conduisait presque automatiquement à la gratuité. C’est-à-dire à un financement essentiellement public, sachant que les retombées économiques de ces événements culturels dépassent largement les dépenses engagées, comme je l’avais montré dans cet article de 2008 intitulé Festives Halles Culture et économie.

Dans un article de 2012, j’avais proposé une réflexion plus générale sur l’apport économique de la culture

Pourtant, gratuit ne veut pas dire médiocre ! D’emblée, avec R. Becker, nous avions affirmé une exigence de qualité, une exigence qui ne s’est jamais démentie depuis l’origine.

Eh oui, comme dit Mme la maire, « Il y a un moment où il faut savoir s’arrêter avant que ça ne devienne trop triste… » Bien triste pour Questembert.

Publié le mercredi 23 novembre 2016, par Paul Paboeuf.

Messages

  • Que Mme la Maire ou un autre élu, s’assure de l’encadrement général de ces petits groupes qui interviennent lors des Festives Halles de telle manière que leurs passages aient une vraie utilité pour eux et pour notre commune, nul ne songerait à le contester. Que nos élus oublient que les arts de la rue véhiculent aussi la solidarité, l’humanité, la confiance en l’autre devient problématique pour la démocratie de proximité !

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  • Depuis 2014 j’assiste avec tristesse à une réduction répétée des manifestations populaires à caractère culturel sur Questembert et sa communauté de commune : Salon du livre et Festi’Mômes en biennale et aujourd’hui le couperet qui tombe sur le Festives Halles alors que nous nous apprêtions à fêter son 20ème anniversaire. Ce Festve Halles c« est l »énergie de tous ces Questembertois bénévoles que j’ai moi-même rejoint en arrivant en 2008 c’est ce Public toujours au rendez-vous à la fois gourmand, curieux, exigeant et bon enfant , ce sont les artistes qui nous ravissent, nous bousculent, nous font tout à la fois rêver et réfléchir et c’est bien sûr la volonté de nos élus d’offrir au plus grand nombre une fête culturelle de qualité . Ce quelque chose entre burlesque, étonnement, frissons, poésie, toutes ces émotions que nous avons partagées avec nos voisins, nos amis, nos enfants, des visages connus ou inconnus.... tous ces sourires, ces rires, ces yeux grands ouverts, ces discussions, ces échanges d’impressions de compréhension, cette belle intelligence collective et citoyenne ETAIT-CE BIEN CELA QU"IL FALLAIT ASSASSINER ,

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  • IL ALLAIT JUSTE AVOIR 20 ANS
    Sa renommée n’est plus à faire, tout un chacun, ici, là-bas , le connaissait : « LE FESTIVE HALLES DE QUESTEMBERT ».
    Chaque année, le dernier samedi du mois d’Aôut, il nous donnait rendez-vous dans les rues de Questembert, il faisait battre le coeur de ville et le notre à l’unisson, d’un même élan, d’un même plaisir....
    Il avait grandi avec nous, facétieux, burlesque, tendre, jovial, bienveillant .En ce beau jour de fin d’été il était partout à la fois... Dans le jardin de la Tour Belmont il animait un jongleur-poète, des chanteuses d’Opéra « décalées »... On le suivait bon enfant derrière ses grandes échasses, son piano à queue qui s’envolait d’une rue à l’autre. On le contemplait sur le parvis des Halles médusé, admiratif devant sa danse acrobatique sur un banc publique. Au-dessus de nos têtes, il éclatait en bulles énormes, improbables ou se cachait dans les flammes du cracheur de feu sur le parvis de l’église, il escaladait les façades, s’envolait dans les airs place du 8 Mai et nous tous rassemblés là... petits, grands, jeunes et vieux d’ici et d’ailleurs, nous le suivions envoûtés par son charme, sa poésie, son talent.
    ENSEMBLE, nous retenions notre souffle devant ses exploits, ses prises de risque. ENSEMBLE, nous éclations de rire devant ses facéties, ses acrobaties. ENSEMBLE, nous échangions des regards complices, nous partagions nos larmes d’émotion et de joie. Et pour prolonger cet immense plaisir avec l’envie de ne pas se quitter, nous nous retrouvions à la même table sous la Grande Halle...
    Il savait nous faire sortir de nos maisons pour vivre en communion des instants magiques loin de nos écrans mortifères qui cultivent chaque jour un peu plus nos ignorances, nos peurs et nous éloignent inexorablement les uns des autres.
    Erreur majeure ou folie meurtrière ?
    Le Festive Halles est mort condamné par une sentence brutale sans appel.
    « Circulez !! Rentrez chez vous !! Il n’y a plus rien à voir !! »
    IL ALLAIT JUSTE AVOIR 20 ANS

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