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La carte d’électeur, le passeport du citoyen

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Samedi 24 mars, nous recevions en mairie, les jeunes électeurs qui viennent d’avoir ou vont avoir 18 ans avant les élections pour une cérémonie citoyenne de remise des cartes d’électeurs.

Inscription automatique

Depuis quelques années, les jeunes qui atteignent 18 ans sont inscrits automatiquement sur les listes électorales. Auparavant, l’inscription était un acte volontaire auprès de la mairie. insouciants comme on l’est souvent à cet âge, les jeunes se trouvaient dans l’incapacité de voter parce qu’ils n’avaient pas pensé à s’inscrire avant le 31 décembre.
Cette inscription automatique risque de banaliser la qualité d’électeur, c’est pourquoi il a été proposé de marquer cette étape par une cérémonie plus officielle au cours de laquelle leur carte d’électeur, passeport de citoyen leur est remis. A Questembert, la cérémonie n’a pas a été organisée chaque année pour éviter des confusions avec des échéances locales. En 2012, année d’élections nationales, il paraissait important de marquer l’accès des jeunes à la responsabilité d’électeur.

Le droit de voter donne le pouvoir de peser sur les choix, sur les décisions qui concernent tous les citoyens. Élire un président, voter pour la liste d’un maire, c’est saisir l’occasion d’orienter les choix qui de toute façon auront des effets sur notre vie quotidienne, sur notre avenir.

L’illusion de la démocratie directe

Mais, comme on l’entend souvent, avant l’élection, ils nous font des promesses, et ensuite ils trahissent leurs engagements. C’est vrai que cela arrive, à chacun de s’en souvenir pour éviter de retomber dans le piège des promesses intenables.

Et il faut pas croire non plus à l’illusion qu’entretiennent certains autour du référendum qui serait l’expression la plus directe et la plus « vraie » de la volonté du peuple. D’abord parce que la plupart du temps, les questions qui se posent sont tellement complexes qu’il est impossible d’y répondre par oui ou par non. Prenons l’exemple du référendum de 2005 sur l’Europe : les électeurs ont probablement répondu à d’autres questions que celle de la constitution européenne.

Quant à la « démocratie participative », son principe est très vertueux : amener les citoyens à prendre conscience des enjeux et à participer à la décision. Idée séduisante de la démocratie directe, intervention rapide du peuple, mais le risque est là de la versatilité, de la demande de réponse immédiate, on le voit ces temps-ci avec des projets de loi qui pleuvent au gré des événements. Une catastrophe, un drame, un crime abominable, et sur-le-champ, la loi censée répondre immédiatement à l’émotion publique.
L’autre danger de la démocratie « participative » est de la voir confisquée par « les professionnels de la participation » : qui parle dans les débats publics ? Souvent les plus habiles à prendre la parole, et souvent aussi les opposants au projet quel qu’il soit. Sans la persévérance des élus, y aurait-il un tramway à Nantes, un métro de Rennes ?

Un droit qui n’est pas universel

Le droit de vote est un droit fondamental du citoyen. C’est banal en Europe, mais pour bien des peuples, le droit de vote, et donc la liberté d’opinion ne sont que des rêves inaccessibles. Dans la société hiérarchisée de l’Ancien Régime, le roi était considéré comme le représentant de Dieu sur la terre et la messe était dite ! L’expression du peuple commence à être entendue avec la Révolution et son texte fondateur, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Mais on est encore bien loin du suffrage universel : jusqu’en 1848, le droit de vote est réservé à une élite de « propriétaires » dont le poids politique se mesure d’abord à leur capacité à payer un certain niveau d’impôt.

Si la France est le premier pays au monde à adopter le suffrage universel en 1848, cette universalité a des limites : par exemple, l’âge. L’âge légal est longtemps resté à 21 ans, avant qu’en 1974, sur la proposition du président Giscard d’Estaing, il ne soit ramené à 18 ans. Mais la limite la plus forte a été celle du sexe : les femmes, en France, n’ont obtenu le droit de vote qu’en 1944 !

2012 : une année capitale

En cette année 2012, ces jeunes électeurs vont z pour la première fois utiliser leur droit pour choisir le futur président de la République et un peu plus tard le député qui nous représentera à l’Assemblée Nationale. C’est une lourde responsabilité et un privilège extraordinaire.

Ce choix personnel aura de l’influence sur la vie de notre pays. Le candidat élu sera assuré de sa légitimité ; mais il ne devra pas oublier qu’il n’a pas été élu à l’unanimité et qu’il doit le respect à l’opposition.

Voter sans illusion

Comme tous les citoyens, ils vont voter pour exprimer leur opinion, leurs espérances, leur désir légitime de transformer le monde, de le rendre conforme à leurs rêves et à leurs valeurs. Mais gare aux illusions de la jeunesse ! Celle par exemple que portent ces mots de l’Internationale « Du passé, faisons table rase. » Il n’y a jamais de table rase, le poids de l’histoire s’impose à tous et les choix les plus affirmés ne peuvent qu’apporter une inflexion à l’évolution du monde. Sans tomber dans l’autre illusion d’un retour en arrière vers un paradis perdu : c’était mieux avant ? Non, c’est la nécessité de construire ensemble l’avenir commun en transformant le présent.

Le contrôle des élus

Le lendemain de l’élection, le travail de citoyen n’est pas terminé. Il faut surveiller, contrôler ce que font les élus, leur rappeler les engagements qu’ils ont pris, leur demander des comptes. Si on a voté sans illusion, si l’élu a su se garder de promesses démagogiques, ce sera facile de le vérifier dans l’action quotidienne.

Le devoir de s’informer

Mais avant d’aller voter, le premier devoir, c’est, pour voter en toute conscience, de s’informer sérieusement sur les enjeux de l’élection. Quand arriveront les « professions de foi » des candidats, la propagande officielle, il faudra prendre le temps de lire ces documents d’un oeil critique. Et ne pas manquer non plus toutes les occasions de mieux comprendre leurs projets et de les confronter avec la réalité.

Être un citoyen, toujours

La loi prévoit que, à la suite de décisions des tribunaux, quelqu’un soit privé de ses droits civiques. C’est toujours une conséquence d’une lourde condamnation. Mais il est important de rester digne de ces droits civiques en respectant les lois de notre pays, parce qu’elles sont décidées par ceux que vous avez élus.
Il faut pas non plus oublier que la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dit en ses articles 13 et 14, qu’être citoyen, c’est aussi payer ses impôts.

En votant, on participe indirectement à l’élaboration des lois, des règles de notre vie commune. On dit parfois qu’il y a trop de lois, de règlements. Sans doute peut-on imaginer des simplifications, mais j’aime bien rappeler les mots de Félicité de Lamennais, un écrivain du 19ème siècle. « Entre le maître et l’esclave, entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui protège. »

Être citoyen, c’est aussi accepter l’éventualité de l’engagement comme élu : dans ces jeunes qui recevaient leur carte d’électeur, il y en aura bien qui oseront sauter le pas et se présenter aux suffrages de leurs concitoyens.

Publié le mercredi 28 mars 2012, par Paul Paboeuf.

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