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Des pauvres plus nombreux, des riches plus riches

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C’est l’INSEE qui le dit dans un rapport officiel, les pauvres sont de plus en plus nombreux, et les riches de plus en plus … riches ! En 2010, le taux de pauvreté a atteint 14,1% en France, son plus haut niveau depuis 1997. Et cela malgré la bonne volonté de Martin Hirsch qui assume d’ailleurs son échec : « Je reconnais m’être planté. Pas sur tout », a-t-il dit lors d’un débat sur la pauvreté au forum « Convergences 2015 ».

500 000 pauvres de plus en un an

Entre 2009 et 2010, la situation, déjà critique, s’est encore aggravée : 14,1 % de la population française se situent au-dessous seuil de pauvreté (964 euros par mois) ; en 2008 on en était à 13 % de la population. La faute à la crise et à sa conséquence la plus visible, le chômage ? Oui, certainement la pauvreté touche plus de 36 % des chômeurs, mais les sinistrés de la pauvreté sont surtout les inactifs (sauf les retraités et les étudiants) et spécialement les enfants. Familles monoparentales, chômeurs, inactifs, voilà où sont les gros bataillons des pauvres. Et pour ces catégories (qui se recoupent partiellement), la stagnation ou la baisse des prestations sociales a contribué à aggraver la situation. Dans le même temps, s’est développé le discours sur le « cancer de l’assistanat » qui a mis les plus pauvres au rang des profiteurs vivant aux crochets des honnêtes travailleurs, au point même que certains ont évoqué la contrainte pour les mettre au boulot. Cela s’appelle les travaux forcés.

S’entendre sur une définition

Pour ne pas se contenter des réponses faciles ou des accusations démagogiques, quand bien même personne ne peut contester que les dernières années ont vu les riches s’enrichir et les pauvres s’appauvrir, essayons de réfléchir sur les définitions statistiques et sur les réalités concrètes de la pauvreté.

En France, un individu peut être considéré comme pauvre quand ses revenus mensuels sont inférieurs à 803 ou 964 euros (données 2010) selon la définition de la pauvreté utilisée (seuil à 50 % ou à 60 % du niveau de vie médian. Le revenu pris en compte est le revenu dit « disponible » : après impôts et prestations sociales. Le revenu médian est défini ainsi : la moitié de la population touche moins, l’autre moitié touche plus.

Cependant, les choses se compliquent d’abord parce qu’en prenant le seuil de 60 % du revenu médian (ce qui est le cas dans le calcul de l’INSEE) au lieu de 50 %, on atteint le nombre de 8,2 millions au lieu de 4,4 millions. Ensuite, même au seuil de 50 % (803 € par mois en 2010), la vie est sans doute plus difficile dans une très grande ville que dans nos zones rurales. D’autre part, vu l’élévation du niveau de vie, le seuil de pauvreté d’aujourd’hui (hors inflation) vous situerait dans les classes moyennes des années 70 !

Les bénéficiaires des minima sociaux

Une autre source statistique vient des prestations sociales : combien dénombre-t-on de titulaires de minima sociaux ? Pour l’année 2010, on comptait un peu plus s de 3,6 millions d’allocataires, et en ajoutant les ayants-droits, plus de 6,3 millions d’individus. Comme si leur situation n’était pas assez difficile, le précédent gouvernement, avec le président en tête, nous avait fait un numéro sur les fraudeurs des prestations sociales, pour détourner l’attention d’autres fraudes bien plus juteuses, et surtout des multiples avantages fiscaux accordés aux plus riches. Un rapport parlementaire (voir ici) évaluait le total des fraudes aux prestations et cotisations sociales à 20 milliards d’euros, dont une part assez faible, entre 2 et 3 milliards quand même, était due aux prestations ((indemnités d’arrêts maladie, allocations familiales, RSA, etc.). Mais la plus grosse fraude venait des cotisations non versées par les entreprises ! Il était bien commode pour Sarkozy, Wauquiez ou Bertrand, de désigner un bouc émissaire.

Quelles conditions de vie ?

La question peut se reformuler ainsi : qu’est-ce qu’être pauvre ? De quoi est-on privé ? Par exemple : peut-on avoir accès au logement ? Peut-on chauffer correctement son logement ? Peut-on payer le restaurant scolaire pour ses enfants ? Tout cela est aussi étudié par l’INSEE à travers des questionnaires très détaillés, qui permettent de mesurer la pauvreté en conditions de vie.

L’attitude devant la vie, le cheval d’orgueil

Face à ces données objectives, les traditions bretonnes opposent une attitude devant la vie, comme l’a montré Per-Jakez Hélias dans son livre Le Cheval d’orgueil :  « Trop pauvre que je suis pour posséder un autre animal, du moins ’le Cheval d’Orgueil’ aura-t-il toujours une stalle dans mon écurie. » Et pas besoin d’avoir fait sociologie pour savoir que l’honneur des pauvres reste une valeur forte chez nous. Pas question de montrer sa misère, au point de renoncer à bénéficier des tarifs avantageux au restaurant scolaire, à solliciter l’aide pour honorer la facture d’électricité ou d’eau. Ce qui conduit à beaucoup d’incompréhension pour ceux qui n’ont pas ces valeurs traditionnelles, parce qu’elles se sont perdues au contact des facilités modernes ou parce qu’une part importante des habitants vient d’autres régions, avec d’autres attitudes devant la vie, d’autres cultures.

Des réalités très dures, et de plus en plus

Mais les « cas soc », comme disent ceux qui ont la chance de ne pas être confrontés à des situations insurmontables, pourraient être de plus en plus nombreux : le choc de l’affaire Doux aura des répercussions lourdes sur les familles touchées par le chômage. Car en plus des emplois directs supprimés dans les unités de La Vraie-Croix, Sérent ou Pleucadeuc, il y aura des effets sur toute l’économie locale. Pas sûr que le Cheval d’orgueil nous aide vraiment à garder la tête haute : la solidarité sera une exigence absolue, mais nous devrons tous ensemble rechercher des solutions pour redonner de la vitalité à notre tissu économique à dominante agricole et agro-alimentaire. C’est un enjeu crucial pour notre avenir qui doit mobiliser toutes les forces de notre région.

Publié le dimanche 30 septembre 2012, par Paul Paboeuf.

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